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« L’Art en Couleurs », chronique sur l’Histoire de la peinture

Thomas Lovy vous propose une série de chroniques sur l’Histoire de la Peinture.

« L’Art en Couleurs » est une invitation à voyager dans l’histoire de la Peinture par l’usage et le sens des couleurs…

Au commencement était le Rouge.

La peinture occidentale apparaît à l’époque préhistorique, il y a environ trente millénaires. Nos ancêtres ont créés ces peintures magnifiques dans des grottes profondes, obscures et cachées. Ils s’éclairaient avec des lampes à graisse et travaillaient sur des parois inégales, parfois sur de hauts plafonds, jusqu’au fond des boyaux.
La découvertes des grottes ornées ces deux derniers siècles et leur étude a transformé notre vision de l’homme « préhistorique » et n’a pas fini de le faire…

Cliquez sur les titres pour visualiser les peintures.

Main négative et points rouges, Pech Merle (Lot), -27000 environ.

A Chauvet, au Pech Merle et ailleurs, on trouve des ensembles de taches rouges. Ce sont des empreintes de paumes enduites d’argile. Ces points rouges sont la signature du groupe, du clan à l’entrée de la grotte.
Il y a aussi des traces de mains positives (empreintes de main) , et négatives comme ici (on souffle la couleur sur la main), le plein et le vide, présence et absence…
On reconnaît des mains d’hommes, de femmes, d’enfants…certaines font des signes (ou sont mutilés).
L’empreinte est le résultat d’un contact avec la paroi. Toucher était certainement un geste sacré, un échange d’énergie avec le lieu. Marquer son empreinte est un acte collectif, une présence forte, qui nous parle au delà du temps.
A l’origine du visible, le toucher…

Ours, Grotte Chauvet-Pont-d’Arc (Ardèche), -33000 environ

Les grottes servaient aussi de refuge à des animaux, comme les lions des cavernes, les grands ours qui venaient y mettre bas et hiberner. Les traces de griffures d’ours sur les murs cohabitent avec les gravures et peintures humaines, et peut-être voyaient-ils ces traces comme une sorte d’écriture animale ?
Les humains étaient peu nombreux et vivaient entourés d’animaux sauvages dont ils étaient très proches. Ils admiraient leur beauté et connaissaient très bien leurs comportements. Mais la création d’image est aussi une mise à distance.
Regardez cet ours. il semble sortir du relief du rocher qui modèle son corps. Il est dessiné d’un trait rouge net, simple, et pourtant très étudié. L’artiste n’a pas eu besoin de faire l’œil ni de préciser les pattes arrières, mais il a fait un trait épais sur le museau et la tête. Bien plus qu’une image d’ours, c’est une présence vivante.

Taureau, Altamira (Espagne), -14000 environ.‌

La connaissance parfaite du comportement animal se voit dans chaque motif de l’art pariétal.
Tel lion lèche sa lionne qui grogne, telle femelle poney est grosse, tel taureau change de pelage etc…Et on la voit dans les attitudes également et dans les positions des oreilles, de la queue, qui expriment les émotions.
Ce grand taureau du plafond d’ Altamira est immobile, comme aux aguets. Le dessin est très stylisé, net, et en même temps réaliste dans les détails: les pattes, la queue, les cornes…Le relief de la paroi renfle le corps et exprime sa masse, comme le rouge intense du pelage.
L’œil est extraordinaire.

Les artistes, hommes et femmes très certainement, travaillaient avec peu de pigments, d’origine minérale : manganèse pour le noir et le gris, oxydes de fer pour l’orangé et le rouge, ocres et terres. Le rouge était la seule couleur vive, déclinée en bruns rouges.
La couleur et la matière, la terre, le minéral, sont une seule chose. Et sa force également.

Mais comment interpréter cet art si subtil et mystérieux ? Art de décoration ? Expression libre ? Magie de la chasse ? Rite religieux ? Les hypothèses sont nombreuses et contradictoires. Notre rouge nous aidera peut-être, à suivre…